Formule de Kellerman et Klein

La formule de Kellerman et Klein est une approche pour évaluer le comportement des boulons sous sollicitations mécaniques.

Table des matières

Kellerman et Klein : la formule détaillée

Développée par les ingénieurs Kellerman et Klein, cette formule offre une méthodologie précieuse pour prédire les déformations et les propriétés mécaniques des matériaux, en particulier dans des conditions de chargement complexes. En se basant sur des principes solides de la mécanique des matériaux, cette formule a trouvé des applications significatives dans divers secteurs de l’industrie, contribuant ainsi à l’amélioration de la conception et à l’optimisation des performances des structures et des composants. La relation entre le couple et l’effort a donc été établie par Kellermann et Klein et a servi de base à plusieurs normes (notamment ISO 16047 et DIN 946).

Voici donc le calcul d’assemblage vissé :

la formule, l'équation Kellerman et Klein
  • C : Couple de serrage en N.m
  • Ft : Tension de la vis en kN
  • P : Pas de la vis en mm
  • µt : Coefficient de frottement du filetage
  • Dt : Diamètre sur flancs en mm (équivalent à D2) donc Dt = diamètre nominal – 0,6495 x pas
  • µh : Coefficient de frottement sous tête
  • Dh : Diamètre moyen sous tête en mm donc Dh = (diamètre tête de vis + diamètre trou de passage) / 2

Comme mentionné précédemment, les résultats de ce calcul d’assemblage vissé présentent une certaine incertitude. En effet, divers paramètres exercent une influence sur les coefficients µt et µh, comprenant les propriétés des matériaux, le type de lubrification, les conditions de surface, la dureté, ainsi que le nombre de cycles de serrages/desserrages. À titre indicatif, voici quelques valeurs de référence pour l’acier :

Lubrification adaptée : µt / µh ≃ 0,10
Lubrification sommaire : µt / µh ≃ 0,15
Montage à sec : µt / µh ≃ 0,20

L’influence du moyen de serrage : un paramètre oublié par Kellerman et Klein

Après avoir parcouru cette première section à propos de la formule de Kellerman et Klein, on peut penser que l’erreur est relativement réduite. Cependant, cette perception est trompeuse, car un autre paramètre exerce une influence significative : le moyen de serrage. Il est crucial de comprendre que régler une clé dynamométrique à 65 N.m ne garantit pas un serrage effectif à cette valeur précise. En réalité, ce type d’outil présente une marge d’imprécision pouvant atteindre jusqu’à 50%. Nous avons détaillé les raisons dans l’article sur le serrage au couple.
Les outils de serrage sont classés en différentes catégories de précision, ce qui est généralement indiqué sur ces instruments, parfois accompagné de l’incertitude associée. Voici quelques exemples de classes de précision couramment rencontrées :

Classe C10 : incertitude de ±10%
Classe C15 : incertitude de ±15%
Classe C20 : incertitude de ±20%
Classe C30 : incertitude de ±30%
Classe C50 : incertitude de ±50%

Pour vous donner une idée approximative, une clé dynamométrique de type « simple » se situe souvent dans la classe C20, tandis qu’une clé dynamométrique électronique ou hydraulique peut être classée en C10 (avec la possibilité de descendre jusqu’à 3% d’incertitude avec certains équipements avancés). En revanche, une visseuse à crabots ou une clé à chocs basique est généralement classée en C50.

Il est important de noter qu’avant la révision de la norme NF E25-030 en 2014, les classes de précision étaient exprimées différemment, avec des dénominations telles que Classe A (précision de ±10%), Classe B (précision de ±15%), Classe C (précision de ±20%), et Classe D (précision de ±50%). Cette évolution normative souligne l’importance de prendre en compte les spécifications actuelles pour évaluer l’incertitude associée aux outils de serrage, minimisant ainsi les risques d’erreurs lors des opérations de serrage.

La torsion : une contrainte à prendre également en compte

Indépendamment de la méthode de serrage au couple employée, une contrainte de torsion indésirable sera inévitablement appliquée, et sa valeur demeure également variable. On estime qu’elle peut atteindre jusqu’à 30% de la contrainte de traction appliquée à la vis.

En général, lors du dimensionnement d’un assemblage boulonné, on prend pour référence que le couple de serrage doit induire une contrainte dans la vis n’excédant pas 90% de la limite élastique. Il est important de noter que cette contrainte dépend à la fois de la tension dans la vis, calculée à partir de la formule de Kellerman et Klein ainsi que de la section résistante de la vis, et de la contrainte de torsion parasite, elle-même liée à la tension.
Lorsque ces deux contraintes sont identifiées, il devient possible de définir la contrainte équivalente de Von Mises appliquée à la vis. C’est cette contrainte qui ne doit en aucun cas dépasser 90% de la limite élastique pour assurer la sécurité et la performance de l’assemblage. Cette approche intégrée garantit une évaluation complète des contraintes subies par la vis, prenant en compte à la fois la traction et la torsion, et contribue ainsi à une conception robuste et fiable des assemblages boulonnés.

Une ligne de boulons à vérifier dans le cadre d'un serrage de maintenance.

Comment estimer le couple à définir ?

Quatre approches s’offrent à vous pour la vérification des assemblages vissés.

La première, à la fois simple et précise, consiste à utiliser un utilitaire de calcul dédié qui facilite la vérification des assemblages vissés. Cet outil permet notamment de définir une consigne de serrage en prenant en compte divers paramètres liés à la vis et à l’ensemble de l’assemblage. Vous pouvez accéder à cet utilitaire de calcul en suivant le lien suivant : vérification d’assemblages vissés.

La deuxième solution consiste à réaliser soi-même le calcul de couple de serrage en se référant à la norme NF E25-030-1. Bien que cette approche soit considérée comme la méthode « correcte », il convient de noter que l’acquisition de la norme peut engendrer des coûts, et son assimilation nécessitera un investissement de temps pour une utilisation correcte.

La troisième solution, à utiliser en première approche, repose sur une estimation du couple de vissage et de la tension de vis en négligeant la contrainte de torsion parasite. Pour compenser cette simplification, une contrainte limite plus basse (par exemple, 75% de la limite élastique au lieu de 90%) est considérée. Il est crucial d’exercer une prudence particulière avec cette approche, car elle repose sur une approximation énorme.

Enfin, la quatrième consiste à penser et à fonctionner directement en tension à l’aide d’un appareil de mesure de tension de serrage. Cela consiste à mesurer l’élongation de la vis sous l’effet de la tension induite par le serrage. Lors du serrage d’une vis, celle-ci s’allonge proportionnellement à l’effort appliqué. La mesure de l’allongement de la vis nous permet de connaître la tension de serrage présente dans la vis et ainsi l’effort installé dans l’assemblage. Cela nous débarrasse définitivement de cette formule de couple de serrage.

Les autres paramètres importants, absents de la formule de Kellerman et Klein

Divers autres paramètres exercent une influence sur la relation entre le couple de serrage et la tension, et ne son pas pris en compte dans la formule de Kellerman et Klein. Ils ne seront pas abordés ici en raison de leur complexité. Toutefois, ces paramètres revêtent une importance cruciale dans des secteurs tels que l’aéronautique et le nucléaire. À titre d’illustration, voici quelques éléments qui affectent le rapport entre le couple de serrage et la tension :

• L’épaisseur des pièces à assembler

• La raideur de l’assemblage

• La longueur de prise des vis

• la température lors du montage

Un autre paramètre, non négligeable, entre également en jeu : l’élément humain. En effet, les résultats peuvent varier sensiblement d’une personne à l’autre lors d’un serrage au couple, en raison de facteurs tels que la vitesse d’exécution, la sensibilité individuelle et la possibilité de double déclenchement. Par nature, ce paramètre est difficilement maîtrisable. Toutefois, il peut être bénéfique d’explorer des méthodologies visant à harmoniser les pratiques au sein des équipes de monteurs, contribuant ainsi à réduire l’impact de cette variabilité. Ainsi, vous comprenez que le sujet est  complexe et dépend de nombreux paramètres qui sont difficilement appréhendables dans une simple formule comme celle développée par Kellerman et Klein.  

Les bonnes pratiques que les opérateurs doivent adopter

Dans une approche générale, l’objectif est de minimiser le couple de serrage tout en maintenant une tension optimale dans la vis pour assurer un serrage efficace. En effet, à mesure que le couple augmente, la contrainte parasite de torsion devient plus significative. Outre le fait qu’elle contraint excessivement la vis, cette contrainte de torsion accroît le risque de desserrage en présence de vibrations.

Les calculs précédemment exposés permettent de comprendre le fonctionnement du serrage, ce qui permet de déduire quelques bonnes pratiques lors d’un serrage au couple :

• Toujours lubrifier (ou huiler) les vis, à moins que le calcul ait été effectué sans lubrification.
• Utiliser des outils de serrage de précision.
• Veiller à la qualité des états de surface.
• Éviter de serrer ou desserrer fréquemment les vis, car cela endommage le pas de vis et augmente µt.
• Essayer de réduire le diamètre du trou (Dh) sans compromettre l’intégrité ou la qualité de la pièce en contact. L’utilisation d’une rondelle est souvent pertinente.

Les méthodes de contrôle du serrage

Malgré tous ces inconvénients et ces approximations, le serrage au couple et la formule de Kellerman et Klein demeurent largement adoptés en raison de leur simplicité et, dans l’ensemble, de leur reproductibilité supérieures par rapport à des méthodes au pifomètre.
Toutefois, pour des applications sérieuses nécessitant une précision et une reproductibilité accrues dans l’effort de serrage, l’utilisation de la clé dynamométrique est limitant, et d’autres méthodes de serrage sont envisagées afin de s’extraire des approximations inhérentes au calcul de résistance,d’arrachement de filetage, et autre tableau de couple de serrage.

Voici quelques exemples de méthodes alternatives :

1. Serrage à l’angle : Dans cette approche, la vis ou l’écrou est d’abord serré avec un couple faible pour établir le contact initial. Ensuite, le serrage se poursuit en se basant uniquement sur l’angle de rotation. En fonction du pas de la vis, on peut déduire l’allongement correspondant et, par conséquent, la tension de serrage.

2. Allongement thermique : Cette méthode implique le chauffage du boulon pour provoquer son allongement, permettant ainsi d’amener l’écrou en contact sans contrainte. Cette approche est relativement peu utilisée en raison de sa complexité.

3. Allongement hydraulique : Cette technique repose sur un allongement contrôlé du boulon. Un tendeur hydraulique est monté sur le boulon, étirant la vis jusqu’à la valeur de tension souhaitée. Une fois l’écrou en contact, la pression dans le tendeur est relâchée. Cette méthode génère généralement des résultats précis.

4. Écrou tensionneur : Cette approche repose sur un gros écrou équipé de vis de contact sur sa périphérie. Le serrage de ces vis, en appui sur la portée, tend le goujon et réalise le serrage. Cette méthode offre de nombreux avantages tels que la précision, l’absence d’appareillage complexe et la facilité de mise en œuvre.

5. Le contrôle de la tension de serrage par ultrasons : cette méthode permet de suivre l’évolution de chacune des vis dans le temps car les datas de serrage de chaque boulon sont enregistrées dans l’appareil de contrôle de serrage ce qui permet une traçabilité exemplaire de chaque opération de serrage.C’est donc la fin du calcul de l’effort de poussée d’une vis car cette donnée est directement mesurée empiriquement.